Le film April in France

April, une petite anglaise de 5 ans, est tout d’abord mécontente de s’installer en France.

De Paris, elle déménage à Labastide d’Armagnac, le petit village médiéval landais où vivait son arrière-grand-père.

Là, elle devient persuadée qu’il ne fait que dormir au cimetière et qu’il reviendra auprès d’elle.

En l’attendant, elle rencontre ses anciens amis.

Avec eux, elle s’ouvrira au monde, découvrira son moi intérieur,

et à son tour transformera à jamais les adultes qui l’entourent.

Certains films viennent nous toucher au plus intime de nous-mêmes.

April in France m’a profondément ému — en tant qu’homme, et plus encore en tant que père.

Ce documentaire, véritable conte philosophique en images,

révèle combien un enfant, lorsqu’on lui laisse l’espace de découvrir le monde par lui-même,

sans lui imposer nos modes de penser ou d’agir,

nous éblouit par la pureté de son regard et la richesse de sa présence.

Il nous déstabilise, parfois, par sa simplicité désarmante.

Et surtout, il nous montre que la transmission n’est pas un fleuve à sens unique :

elle circule, vivante, entre les générations.

David Boaretto, réalisateur du film et père d’April, a su capter cette magie avec une rare délicatesse.

Après la projection, il nous a partagé quelques éclats de son chemin :

dans sa démarche, il n’a jamais dirigé ni corrigé sa fille.

Il a filmé en retrait, sans intervenir, aussi longtemps que son propre cœur pouvait supporter ce lâcher-prise radical.

Un jour, par exemple, il l’a vue badigeonner un mur de rouge à lèvres — celui de sa mère.

Il ignorait que la tache serait indélébile.

Mais il a compris qu’en renonçant à intervenir, il venait d’ouvrir un passage secret :

celui de la confiance absolue.

Libre de tout jugement, libérée de toute attente,

April a offert ce qu’elle avait de plus précieux — son plein élan vital, sans retenue.

Le public, ce soir-là, était frappé par la profondeur de sa maturité émotionnelle.

Me revient ce proverbe africain :

« On ne tire pas sur une fleur pour la faire pousser.

On l’arrose et on la regarde grandir… patiemment. »

Je me suis aussi laissé toucher par l’écho que le film a trouvé bien au-delà de nos frontières.

En Chine notamment, de jeunes adultes en larmes sont venus confier au réalisateur

le poids du traumatisme de l’exode rural,

de la séparation d’avec leurs terres d’enfance.

Ils découvraient, avec une émotion presque incrédule,

que des îlots de tendresse envers les enfants existaient encore,

dans nos villages landais et gersois.

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